[portrait] Mia Guissé, Pape Diouf, Wally Seck : Kruh Mandiou Mauri, Le Lyris’hit [portrait] Mia Guissé, Pape Diouf, Wally Seck : Kruh Mandiou Mauri, Le Lyris’hit

L’industrie de la musique est un univers vaste. Derrière chaque artiste s’active dans l’ombre une armada de bras œuvrant pour son rayonnement. Parmi eux figure Kruh Mandiou Mauri. Un nom qui ne dit, sûrement, pas grand-chose aux amateurs de musique sénégalaise. Mais ses réalisations, si ! Il est l’auteur d’un nombre incalculable de morceaux à succès au cours de ces dernières années. Zoom sur un artiste dont la plume a permis l’envol vers la gloire de plusieurs chanteurs.
La Médina, un quartier à la popularité héréditaire. Cette commune ne compte plus les illustres personnages de la musique sénégalaise qu’elle a vue naître d’Omar Pène au groupe Daara J au plus célèbre de tous : Youssou Ndour. Et l’histoire continue de s’écrire avec la nouvelle génération qui souhaite qui souhaite inscrire aux côtés de ces personnages emblématiques. Dans son studio situé en plein cœur du marché Tilène, Cheikh Tidiane Kourouma nourrit cette ambition. Plus connu sous son nom d’artiste Kruh Mandiou Mauri (enfant sorcier en bambara), il est un auteur-compositeur ayant fait ses premiers pas dans le rap en 2008. Mais entre la musique et lui, c’est une histoire d’amour qui a débuté depuis sa tendre enfance. « A l’âge de 6 ans, mon père me donnait 200 francs pour partir à l’école. Cet argent me servait à acheter des piles pour mon walkman coby. Donc, écouter de la musique était beaucoup plus important pour moi que de manger », se remémore-t-il le sourire gingival. Comme à l’accoutumée dans la société, la pratique de l’art sous toutes ses formes comme moyen de subsistance est très souvent mal perçue par les familles. Kruh Mandiou a dû endurer cette épreuve : « Ma mère me traitait tout le temps de bon à rien parce que je passais tout mon temps à écrire. Et l’écriture en ce temps n’était pas un travail. Ma mère m’avait conseillé de rejoindre une usine de fabrique de cigarettes qui rémunérait 4000 francs la journée. Je lui disais qu’avec ce que je faisais, je pouvais avoir des millions ». Se pliant à la volonté de sa mère, il va effectuer des travaux journaliers dans des usines. Cependant, il est toujours rattrapé par sa passion et son envie de demeurer autonome. « Je n’ai jamais voulu travailler pour quelqu’un et quand j’ai intégré cette usine, quelqu’un m’a commandé et j’ai aussitôt arrêté », dit-il.
Le groupe Sen Kumpe, sa deuxième famille
Le naturel revenant à chaque fois au galop, Kruh replonge dans sa passion. C’est ainsi qu’il rencontre Books et Bourba Djolof, membres du célèbre groupe de la Médina « Sen Kumpe ». Le deuxième cité va lui être d’un grand apport dans sa carrière puisqu’il ne cessera de l’encourager. Devant se rendre à Tambacounda pour démarrer un travail décroché grâce à sa mère, Kruh se rend chez Bourba pour lui dire au revoir. Le membre du groupe Sen Kumpe lui dit : « Fais ce que ta mère te dit de faire et ce que tu veux garde-le dans ton cœur parce que c’est à toi. Et je sais que l’on va t’entendre partout dans le monde ». Ces mots ont eu un drôle d’écho auprès de l’interlocuteur qui ne voyait pas comment les prédictions de son mentor pouvaient se réaliser. « Quand il m’a dit ça, je n’y croyais pas. Parce qu’on on avait du mal à manger les nuits et il me dit qu’on va m’entendre partout dans le monde », se souvient-il en affichant un large sourire. Là encore, le rappeur abandonnera ce métier pour revenir à sa passion, la musique. Suite aux décès de ses parents, Kruh voit en Bourba Djoloff une seconde famille : « Il m’a récupéré, m’a hébergé et il me donnait à manger ». De là, il accompagne le groupe dans ses différentes performances. En 2010, lors du Festival Mondial des Arts Nègres (FESMAN), il partage la scène avec Books. Par la suite, il se lance dans une carrière d’acteur en faisant des apparitions dans des clips vidéos tels que « Dina Bakh » de son ami Books et « Ghetto Swagg » de Nitdoff. Ses différents rôles ont l’air de marquer le public mais les remarques ont le don de l’irriter. « Vu que les gens me voyaient en train de faire de la comédie, ils se disaient, celui-là, c’est un comédien. Ici au Sénégal, on ne sait pas ce qu’est un artiste », argue-t-il. Peu de temps après, son allié numéro 1, Bourba, décède. Kruh décide de prendre le relais et forme un duo avec Books. Une aventure qui sera de courte durée.
Le journal rappé, sa rampe de lancement
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Un personnage qui semble lui coller à la peau jusqu’à présent : « Jusqu’à présent, quand je circule dans la rue, il y a des personnes âgées qui me reconnaissent dans la rue et me disent : « Mara, tu es où à présent ? ». Kruh Mandiou Mauri fait le grand saut dans le « game » en 2016 avec le clip « Waaw wala deet » en featuring avec Xuman et No Face. Quelque temps après, ils effectuent le remix « Det ak det » pour s’opposer au projet de révision de la constitution du Président Macky Sall.
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De Maabo, Adiouza, Pape Diouf…
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A la renaissance de Mia Guissé !
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« C’est dommage que la SODAV ne paie pas comme elle devrait le faire »
Côté rémunération, Kruh Mandiou affirme ne pas se plaindre même s’il déplore certains procédés de la Société Sénéglaise des Droits d’auteurs. « C’est dommage que la SODAV ne paie pas comme elle devrait le faire. Je suis enregistré à la SACEM parce que j’ai des artistes qui y ont déclarés leurs œuvres. Mais la SACEM me dit aujourd’hui que si je veux l’intégrer à 100%, il faut que je quitte la SODAV. Parce qu’on ne peut pas être dans les deux entités. En effet, lorsque la SACEM veut te payer, elle passe par la SODAV qui prend son pourcentage et te donne le reste », fustige-t-il. L’auteur de tubes à succès est aussi désireux de partager son savoir-faire aux plus jeunes. A cet effet, il a ouvert une école dans laquelle il forme les jeunes filles et fils de Médina à l’écriture. Son vœu ultime est d’ériger un studio dans son quartier pour, dit-il, « faire éclore les futurs Youssou Ndour ou Viviane Chidid ».
Auteur: Moustapha TOUMBOU – Seneweb.com